Article écrit à quatre mains par François Veauleger et Sebastien Lopez
Comme l’a écrit Géraldine Mosna-Savoye; « les cafés sont envahis de travailleurs indépendants, des free-lances, qui, seuls, silencieux et penchés sur leurs ordinateurs feraient désormais des cafés plein de conversations de comptoirs, de débats cacophoniques, mais aussi de création, de culture et d’esprit, des espaces vides, sans âme et sans vie, et donc sans esprit ».
Sébastien et moi, faisons parties de ces travailleurs indépendants ayant décidé à un moment de changer de vie, de nous mettre à la disposition des autres, mais à notre compte… Malgré tout, nous ne nous considérons pas comme des bêtes silencieuses fermés au monde et aux échanges.
Nos deux parcours et métiers respectifs ne sont pas antinomique, bien au contraire. Une passion nous a réunis, la montagne, mais notre idée de travailler et d’écrire ensemble, vient d’un échange (d’une bière plutôt) sur : « Ton métier c’est quoi déjà ? ahhhh ! les transports ! ce n’est pas très glamour comme job ça ?». Et qu’au fur et à mesure des bières, se dire que la mobilité ne fonctionne pas sans information et transformation.
L’un à fait sa carrière dans le loisir, le marketing, l’autre dans les travaux et les grands projets de transport public. Nos différences, nous avons essayé de les traduire dans cet article, d’apporter notre pierre à l’édifice de la réflexion de ce que peut être la mobilité de demain entre marketing et technique.
Ca commence par ça…
Et cela commence dans l’antiquité, car on appelait communication, le fait de se déplacer pour donner un message ou une information. D’où, l’apparition dans les écrits de l’Egypte antique de « voies de communication » qui s’apparente aujourd’hui à un domaine d’ingénierie que l’on appelle dans notre monde un peu plus moderne, la mobilité.
Sans remonter jusqu’à la roue, ni au cheval, la mobilité à connue ses révolutions, qui ont elles-mêmes suivi d’autres « Evolutions » universelles, le chemin de fer, l’aviation et même internet et le géopositionnement.
Pourtant, même si l’être humain est capable de diffuser un message à la vitesse de la lumière, il n’en n’est pas moins exempté de ses conséquences, car toutes ses révolutions qu’elles soient industrielles ou sociétales, ont eu des conséquences non maitrisées par l’usage. Le charbon du XIXème siècle pour faire rouler « la Lison » de la bête humaine et fonctionner les usines nécessitait des mines et une exploitation compliquée tant sur le plan humain que sur le plan écologique.
L’essence et le pétrole du XXème siècle sont dans la même lignée, sa production à un effet sur l’environnement et son usage est encore pire avec son utilisation et les rejets qu’il peut produire dans l’atmosphère.
Et l’électrique dans tout ça ?
Même si son usage reste plus « propre » au niveau de la voiture particulière, le stockage de l’énergie reste problématique, pour faire simple, la fabrication et le recyclage des batteries de stockage sont encore un point noir dans l’usage de la mobilité électrique.
Et puis au final, l’électrique se développe sur le marché des particuliers mais qu’en est-il sur les poids-lourds et transporteurs ? Car les voies de communications se sont aussi développées pour la logistique mondiale. Internet a amené la communication instantané et Amazon a apporté la commande « Prime » en « 1-click »…
Mais la petite camionnette qui apporte votre colis jusqu’à votre porte, utilise des voies de communication, consomme de l’énergie ( électrique ou fossile) et le marché de la logistique est loin d’être en récession….Quant à la consommation électrique et la chaleur que produit les serveurs informatiques utilisés pour les données internet…. Ca donnera lieu à un article futur sur le sujet.
Sur le plan des voies en elles-mêmes, on a remplacé les pistes creusées par l’homme par des routes…qui sont devenues autoroutes et qui nécessitent un revêtement constant.
Le tapis (pour les techniciens) est composé d’hydrocarbures, on ne peut pas forcément l’associer à un procédé neutre pour l’environnement. Pourquoi j’insiste sur ces voies, c’est que leur durabilité est peu prise en compte, car considéré comme un consommable. Lorsqu’elle se détériore, on recharge, ce n’est pas grave car prévu.
Un revêtement durable dans le temps, écologique et sans empreinte, n’existe pas…Chaque maître d’ouvrage à sa licorne (ou son mouton a cinq pattes), au moment de refaire une voirie. Toutes les solutions sont bonnes à mettre en œuvre et tendront vers la réduction de l’impact écologique, mais aucune n’arrivera à être 100 % écologique.
Le transport collectif est un peu le mal aimé de la chaine de mobilité, principalement car prendre son véhicule personnel est toujours plus simple et souvent l’unique solution pour se déplacer. De plus, nous sommes souvent à l’écoute de notre planète que jusqu’au digestif, passé ce moment nous revenons aux rêves personnels d’intérieur cuir, de voitures hybride de 400cv et de bras à la fenêtre.
Le vivre ensemble est souvent oublié aussi, on supporte difficilement d’être transporté avec d’autres personnes (l’admissibilité de l’autre, on développera cela après).
Comme pour notre alimentation, il est donc nécessaire d’amorcer une modification de notre mobilité. Et moi je l’avoue, je suis Flexi-Transport, je prends aussi les transports en communs… Ça fait du bien de le dire !!!!!». Mais comme dirait le coach, la réussite est au fond de nous !
ET SI ON REPENSAIT LA MOBILITE EN PRENANT EN COMPTE LES CONSEQUENCES ECOLOGIQUES QU’ELLE PEUT AVOIR ?
Le centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), établissement public et bras armé du ministère de la transition écologique à édité en juillet 2018 six feuilles de route sur la mobilité 3.0, souhaitant donner une vision à 10 ans de ce qu’il serait bon de faire.
- Gestion multimodale des trafics, L’enjeu de « la gestion multimodale des trafics » avec à la clé, un triple objectif : assurer une meilleure accessibilité des territoires, proposer un parcours plus fluide aux usagers et contribuer à une diminution du coût public du transport.
- Mobility as a Service, Il conçoit la mobilité comme un service permettant d’aller d’un point A à un point B quel que soit le mode de transport utilisé, public comme privé. Le MaaS repose sur une unification des services de mobilités et une fusion des outils de billettique et d’information multimodale.
- Solutions ITS pour les territoires peu denses, Les habitants des territoires ruraux ou périurbains (un tiers des Français) sont confrontés à une faiblesse des transports collectifs peu adaptés aux zones peu denses et à l’allongement des trajets domicile-travail, entraînant une dépendance à la voiture. Les ITS proposent cependant des solutions alternatives pour tendre vers une mobilité plus inclusive.
- Logistique urbaine, De la mutualisation des plateformes, aux véhicules propres en passant par les robots-livreurs, les innovations foisonnent. Dans ce nouveau paysage, les pouvoirs publics ont un rôle à jouer pour définir les règles du jeu et accompagner cette transformation.
- Big Data, Face à des données toujours plus nombreuses et des traitements toujours plus puissants et plus rapides, le Big Data peut contribuer à optimiser les systèmes de mobilité et en particulier une meilleure connaissance de la mobilité, l’évaluation des politiques publiques, l’information aux usagers.
- Et enfin, l’Infrastructures connectées. Une route plus sûre, plus fluide, plus durable, plus confortable, offrant de nouveaux services de mobilité : telle est la promesse d’une infrastructure connectée communicant avec les véhicules et les usagers. Le défi est maintenant d’accélérer le passage de la d’une phase d’expérimentation à une phase de déploiement à grande échelle.
Plus d’informations sur l’article du CEREMA. Le CEREMA a sorti un guide pratique pour les territoires très intéressant et qui permet de donner des idées aux décideurs publics qui souhaitent avancer sur leur périmètre administratif sur le sujet : retrouvez le içi
Du coté de Greenpeace, une groupe d’indicateurs à été posé sur les grandes villes francaises pour voir ou elles en étaient sur les transports et la lutte contre la pollution de l’air.
Effectué en 2018, leur étude pointe du doigt les villes mais ne traite pas le phénomène de mobilité dans sa globalité. Elle sert malheureusement plus de jugement que de feuille de route pour progresser.
Même si des outils ou des exemples sont donnés dans ces différentes lectures françaises, pour moi ça manque encore de stratégie.
Comment réduire les conséquences de l’accélération de la mobilité moderne sur l’environnement ? Mettre en place des premiers projets sur quelques territoires fera l’effet d’un pansement sur une jambe cassé (c’est toujours mieux que rien, me direz-vous…) mais le paradigme n’a pas encore été modifié et la « route » est encore longue.
ET SI NOUS REGARDIONS CHEZ NOS VOISINS ? (Oui, Oui, on va quand même le faire…)
A l’Université de Lausanne, Giuseppe Pini et Sonia Lavadinho ont écrit un article très intéressant sur le développement durable, la mobilité douce, la santé en zone urbaine ou ils se posent les questions sur l’adoption de la manière d’appréhender de nouvelles politiques de déplacement.
Comment l’environnement construit et les infrastructures influencent-ils la mobilité douce, et en particulier la marche à pied ?
Quelles sont les mesures de planification urbaine qui assureraient la réussite de politiques de promotion de la mobilité douce ?
Comment un environnement construit favorable à la mobilité douce peut-il contribuer à un style de vie plus sain et par conséquent produire plus de durabilité ?
Ils démontrent notamment que le consensus général dans la recherche internationale convient sur le fait que l’attractivité d’un cheminement piétonnier dépend d’un assortiment complexe de facteurs, y compris la sécurité routière, le sentiment de sécurité personnelle et la menace perçue de l’assaut, l’intérêt architectural, l’exposition aux éléments climatiques, la qualité de l’éclairage, du mobilier urbain et autres éléments d’aménagement, la présence d’autres piétons, les conditions aux intersections, pour ne citer que quelques uns des facteurs de l’environnement construit qui influencent l’expérience de la marche en ville.
Le rapport suggère de tenter d’éliminer autant que faire se peut les escaliers et autres obstacles qui obstruent les cheminements, et d’aménager là où c’est possible et judicieux des voies piétonnes séparées des flux motorisés. Ils développent aussi le concept de Pedestrian Level of Service (LOS) qui se définit comme une mesure globale des conditions de marche sur un itinéraire donné et est directement liée aux facteurs qui affectent la mobilité, le confort et la sûreté des piétons. Cette notion reflète les perceptions du piéton et son jugement par rapport au degré de « marchabilité ». Lire l’article complet
Le Dr Ulrich Seewer dirigeant de l’Office fédéral du développement territorial ARE de Berne, s’attache à la mobilité de loisirs et démontre que depuis les années 2000, que 40% des de tous les trajets journaliers étaient liés aux loisirs. De ce constat, il exprime les projets de l’ARE à l’horizon 2030 pour répondre au besoin des usagers notamment avec RFF pour que le rail remplisse déja partiellement ce besoin de mobilité de loisirs en Suisse. L’article du Dr Ulrich Seewer
Enfin, dans leur livre, Enjeux du développement urbain durable paru en 2005, Antonio Da Cunha, Peter Knoepfel, Jean-Philippe Leresche et Stéphane Nahrath insistent sur l’importance de la gouvernance et la complexité de la prise de décision qu’elle entraine quant à l’évolution des politiques publiques sur la durabilité des actions urbaines. La qualité de leurs cadres de vie, l’organisation des mobilités et l’agencement de leurs formes, les incidences environnementales de leurs métabolismes, mais aussi leur gouvernance, constituent des enjeux d’actualité des villes actuelles. Pour eux, la ville n’est pas durable, mais elle peut contribuer à la durabilité. Lire une partie de leur livre
FIN DE LA PERMIERE PARTIE…